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Enlèvement : retour de l’enfant malgré l’existence d’une décision ultérieure sur sa garde

En application de la convention de La Haye du 25 octobre 1980, le seul fait qu'une décision relative à la garde ait été rendue ou soit susceptible d'être reconnue dans l'État requis ne peut justifier le refus de renvoyer l'enfant.

Cass. 1e civ. 8-7-2021 n° 21-13.556 FS-B


Par Emmanuel de LOTH

Un père reconnaît sa fille née en Allemagne le 18 août 2018 et souscrit avec la mère, auprès de l’état civil allemand, une déclaration d’exercice conjoint de l’autorité parentale. Le 8 août 2019, la mère s’installe en France avec sa fille. Quelques semaines plus tard, le père dépose une demande de retour de l’enfant auprès de l’autorité centrale allemande.

Le 27 février 2020, le procureur de la République assigne la mère devant le juge aux affaires familiales pour voir ordonner le retour de l’enfant sur le fondement de la convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants et des dispositions du règlement 2201/2003 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale.

Le 6 mars 2020, un tribunal allemand, saisi parallèlement, transfère provisoirement à la mère la résidence de l’enfant, le père faisant appel de cette décision.

La cour d’appel de Toulouse ordonne le retour de l’enfant en Allemagne. Les juges relèvent en effet que la résidence habituelle de l’enfant était située en Allemagne. Par ailleurs, l’exercice de l’autorité parentale était conjoint en vertu du droit allemand. Enfin, la mère, venue passer des vacances avec sa fille en France, y est demeurée avec elle malgré l’opposition du père.

Devant la Cour de cassation, la mère fait valoir que le père avait perdu sa qualité de gardien par suite de la décision allemande du 6 mars 2020, de sorte qu’il ne pouvait plus réclamer le retour immédiat de l’enfant.

Rejet du pourvoi. En premier lieu, selon l'article 3 de la convention de La Haye précitée, le déplacement ou le non-retour d'un enfant est considéré comme illicite lorsqu'il a lieu en violation d'un droit de garde, exercé de façon effective ou qui aurait pu l'être, attribué par le droit de l'État dans lequel l'enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement, ce droit de garde pouvant résulter d'une décision judiciaire ou administrative, d'une attribution de plein droit ou d'un accord en vigueur selon le droit de cet État.

En second lieu, aux termes de l'article 17 de la même Convention, le seul fait qu'une décision relative à la garde ait été rendue ou soit susceptible d'être reconnue dans l'État requis ne peut justifier le refus de renvoyer l'enfant dans le cadre de cette Convention, mais les autorités judiciaires ou administratives de l'État requis peuvent prendre en considération les motifs de cette décision qui rentreraient dans le cadre de l'application de la Convention.

Les Hauts Magistrats confirment la décision de la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche inopérante concernant une décision relative aux modalités de la garde rendue ultérieurement.

A noter :

Comme le relève le rapport explicatif sur la Convention, la solution de l’article 17 « s’accorde parfaitement au but conventionnel de décourager les éventuels enleveurs qui ne pourront protéger leur action ni par une décision “morte”, antérieure au déplacement mais jamais exécutée, ni par une décision obtenue postérieurement et qui sera, dans la plupart des cas, entachée de fraude. » (E. Pérez-Vera : Rapport explicatif sur la Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, n° 123).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne