Dans un lotissement, les permis de construire ne peuvent pas être refusés ou assortis de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme intervenues après l’obtention de l’autorisation de lotir et ce, pendant un délai de 5 ans (C. urb. art. L 442-14 ). On parle de « cristallisation » ou de stabilisation des droits à construire dans le lotissement.
Un permis d’aménager un lotissement a été accordé, au vu du plan local d’urbanisme (PLU) alors en vigueur. Ce PLU a été annulé, ce qui a eu pour effet de remettre en vigueur rétroactivement le POS immédiatement antérieur qui classait les parcelles du projet de lotissement en zone non constructible. Le lotisseur assigne la commune en indemnisation du préjudice résultant de l’impossibilité de réaliser le projet de construction envisagé.
En appel, il est débouté. D’après le juge d’appel, la cristallisation empêche que l’ancien POS remis en vigueur soit opposé aux demandes de permis de construire. Il n’y aurait donc pas de lien de causalité directe entre l’illégalité du PLU et l’impossibilité de réaliser le lotissement.
Cassation. Pour le Conseil d’État, la cristallisation des règles d’urbanisme ne joue que dans le cas où des dispositions d’urbanisme sont adoptées après l’autorisation de lotissement. En revanche, elle ne joue pas dans le cas où il s’agit de règles d’urbanisme anciennesremises en vigueur par l’effet d’une annulation contentieuse intervenue après l’autorisation de lotissement.
À noter : L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme, le document d'urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur (C. urb. art. L 600-12). Le Conseil d’État refuse d’assimiler la remise en vigueur d’un document d’urbanisme par l’effet de cette disposition à l’édiction de dispositions d’urbanisme nouvelles, inopposables aux demandes de permis de construire dans les 5 ans de l’achèvement du lotissement.
Dans l’arrêt commenté, le Conseil d’État rappelle que depuis la loi Élan – non applicable en l’espèce, précise-t-il – l’annulation totale ou partielle d’un plan local d’urbanisme (PLU) pour un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au lotissement n’empêche pas la « cristallisation » des règles au vu desquelles le permis d’aménager a été accordé (C. urb. art. L 442-14, al. 4 créé par la loi 2018-1021 du 23-11-2018). La loi Élan modifie donc les termes de la question puisqu’elle maintient la cristallisation des dispositions annulées ou déclarées illégales pour un « motif étranger » au lotissement, notion que la jurisprudence devra éclairer.
Juliette COURQUIN
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Urbanisme Construction n° 27060