Votre métier
icone de recherche
icone de recherche
logo
Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Affaires/ Clauses abusives

Contrat de déménagement conclu par un consommateur : la franchise d'indemnisation est abusive

Une clause d'un contrat de déménagement laissant une franchise d'indemnisation à la charge du consommateur en cas de dommage est présumée abusive de manière irréfragable.

Cass. com. 13-4-2022 n° 20-17.128 F-D, J. c/ Sté Service poids lourd


Par Maya VANDEVELDE
quoti-20220615-affaires.jpg

©Gettyimages

Sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat (C. consom. art. L 212-1). Sont irréfragablement présumées abusives, et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une de ses obligations (art. R 212-1, 6°).

Un particulier agit en réparation contre un déménageur qui a abîmé un meuble au cours du transport. Un tribunal rejette sa demande : si la réparation du dommage devait être mise à la charge du transporteur, le montant de ce dommage (200 €) était inférieur au montant de la franchise prévue par le contrat (390 €), de sorte que le consommateur ne pouvait obtenir aucune indemnité.

La Cour de cassation censure le jugement au motif suivant, relevé d'office : une telle clause, ayant pour effet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement du professionnel à l'une de ses obligations, est présumée abusive de manière irréfragable. 

A noter :

1° Dès lors qu’elle se trouve dans la liste noire figurant à l'article R 212-1, la clause d'un contrat conclu avec un consommateur doit être réputée non écrite, quelles que soient les circonstances de sa conclusion, l’éventuelle absence de déséquilibre qu’elle entraîne ou son intensité (Cass. 1e civ. 11-12-2019 n° 18-21.164 F-PBI : RJDA 3/20 n° 181). Tel est le cas des clauses limitatives de responsabilité, expressément visées à l’article R 212-1. Sont ainsi réputées non écrites non seulement les clauses qui excluent toute responsabilité, mais également celles qui fixent un plafond d'indemnisation (par exemple, déclarant abusive la clause d'un contrat de déménagement prévoyant un plafond de réparation : Cass. 1e civ. 11-12-2019, précité).  Il résulte de la décision commentée que la clause prévoyant une franchise à la charge du consommateur n'échappe pas à la sanction.  

2° Dans la droite ligne de la jurisprudence de la Cour européenne (CJCE 4-6-2009 aff. 243/08 : RJDA 10/09 n° 899), reprise dans le Code de la consommation (C. consom. art. R 632-1, al. 2), la Haute Juridiction rappelle que le juge national est tenu d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle s’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet. S’il considère qu’une clause est abusive, il ne l’applique pas, sauf si le consommateur s’y oppose (CJUE ord. 3-3-2021 aff. 13/19 : BRDA 11/21 inf. 19).

En relevant elle-même d'office le moyen tiré du caractère abusif de la clause de franchise, dans une affaire où ni le juge d'instance ni vraisemblablement le pourvoi ne l'avaient soulevé, la Cour suprême fournit une illustration de l'efficacité de cette règle pour assurer l'effectivité de la protection des consommateurs contre les clauses abusives.

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne