Un entrepreneur est propriétaire indivis d’un immeuble avec sa mère, qui y réside. Dans le cadre de la liquidation judiciaire de l’entrepreneur, la licitation de l’immeuble et l’ouverture des opérations de liquidation et de partage de l’indivision sont ordonnées à la demande du liquidateur judiciaire. La mère de l'entrepreneur fait opposition à cette décision et demande le maintien de l’indivision (C. civ. art. 822) ainsi que l’attribution préférentielle de l’immeuble (art. 831-2).
La cour d’appel d’Aix-en-Provence rejette ces demandes, estimant que les textes précités ne s’appliquent pas à un immeuble soumis à une vente forcée qui intervient en exécution des règles spéciales et d’ordre public relatives à la procédure collective.
La Cour de cassation censure cette décision : la licitation de l’immeuble indivis, qui était l’une des opérations de liquidation et partage de l’indivision préexistante au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire de l’entrepreneur, échappait aux règles applicables en matière de réalisation des actifs de la procédure collective. Elle ne pouvait être ordonnée qu’après examen des demandes formées par les coïndivisaires de l’entrepreneur et tendant au maintien dans l’indivision et à l’attribution préférentielle de l’immeuble.
A noter : les pouvoirs du liquidateur judiciaire sur un bien indivis en cas de liquidation judiciaire d’un des indivisaires diffèrent selon que l’indivision est antérieure ou postérieure au jugement ouvrant la procédure collective.
Si l'indivision est née avant le jugement d'ouverture, la procédure collective n'a pu appréhender que des droits indivis et non le bien lui-même. Le liquidateur ne peut donc agir qu'en licitation partage soit en application de l’article 815 du Code civil au nom de l’indivisaire qui est dessaisi de ses droits sur son patrimoine par l’effet de la liquidation judiciaire (Cass. com. 3-12-2003 n° 01-01.390 FS-P : RJDA 4/04 n° 492), soit au nom des créanciers de celui-ci en application de l’article 815-17, al. 3 du même Code (Cass. com. 3-10-2006 n° 05-16.463 F-PB : RJDA 6/07 n° 668). Les règles de l’indivision doivent être respectées, notamment celles relatives aux demandes tendant au maintien de l’indivision et à l’attribution préférentielle du bien.
Si l'indivision est née après le jugement d'ouverture, la procédure collective a appréhendé le bien avant qu'il ne devienne indivis, de sorte que le liquidateur peut faire vendre le bien selon les modalités propres à la procédure collective (Cass. com. 27-9-2016 n° 15-10.428 F-PB : RJDA 12/16 n° 885). Un bémol cependant, prévu par le droit des procédures collectives : le liquidateur ne peut pas, sauf accord du débiteur, réaliser les biens ou droits acquis au titre d'une succession ouverte après le jugement prononçant la liquidation judiciaire ni provoquer le partage de l'indivision pouvant en résulter (C. com. art. L 641-9, IV modifié par ord. 2014-326 du 12-3-2014 et applicable aux liquidations judiciaires ouvertes après le 1-7-2014).
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial nos 30306, 30319, 30352 et 63100